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- Des livres par thèmes
- Les notes de lecture
- La page des vidéos de présentation
- Des livres pour l'été 2019 (liste proposée par les BOUILLONS d'Angers)
- Trois collections chez L'Harmattan : Histoire de vie et formation / Encres de vie / Autobiographie et éducation
- Notre équipe a publié : Catherine Malard / Michèle Cléach / Marie-Pascale Lescot
Ourika

Livre de Claire Duras (née de Coëtnempren de Kersaint)
Traversée des questions de l’époque — la traite des Noirs, l’éducation des filles, leur réclusion au couvent, la Révolution, la terreur… — et les débats entre « esprits libéraux et éclairés… », Ourika connut un très grand succès au moment de sa publication en 1823.
Sauvée de l’esclavage par un chevalier qui l’a amenée du Sénégal en France la jeune Ourika est élevée dans un milieu privilégié où, « spirituelle et aimable », elle apprend le « bon goût » sans subir le moindre effet de racisme. Une conversation lui révèle cependant l’horreur à laquelle la voue sa couleur dans un tel milieu : « Je me vis négresse, dépendante, méprisée, sans fortune, sans appui, bientôt rejetée d’un monde où je n’étais pas admise ».
- Pour écouter le livre :
- Lire la version numérisée par la BNF-GALLICA (la 3è édition du livre en 1826)
Entre les murs du ghetto de Wilno 1941-1943

Livre de Yitskhok Rudashevski (réédition en format poche)
Enfermé dans le ghetto de Wilno, Yitskhok Rudashevski livre un témoignage poignant de la vie quotidienne et des aspirations d’un adolescent confronté à l’enfermement et aux persécutions.
Véritable « Journal d’Anne Frank », le manuscrit sera retrouvé après la guerre dans la cachette où la famille avait espéré échapper à la traque des nazis.
Ce journal se termine en avril 1943, six mois avant que Yitskhok Rudashevski soit assassiné à Ponar, le lieu d’exécution des Juifs de Wilno, le 1er octobre 1943. Son journal sera retrouvé après la guerre par sa cousine, survivante du ghetto, et confié au Yivo de New York par le grand poète et héros Avrom Sutzkever.
Présentation (diffusion AKADEM)
Bonjour Pa' - Lettres au fantôme de mon père

Livre d' Ariane Ascaride
La découverte d’une voix singulière, drôle, touchante et poétique.
Intimes et universelles, ces lettres d’Ariane Ascaride à son père depuis longtemps disparu mêlent les souvenirs d’enfance de la fille d’immigré italien de Marseille à un regard féroce et tendre sur notre époque. Écrites dans le temps arrêté du confinement, elles tracent l’autoportrait émouvant d’une femme qui a hérité de son père son verbe haut, son humour ravageur et une part de révolte. Elles disent, avec verve et parfois colère, la violence de notre société néolibérale, la bêtise humaine, mais aussi les plaisirs du quotidien et la joie des liens qui nous unissent.
Ariane Ascaride est comédienne. Elle joue notamment dans les films de son mari, Robert Guédiguian, qui se déroulent pour la plupart dans les quartiers populaires de Marseille. À travers ses rôles, elle défend un cinéma social et engagé. Elle a reçu le César de la meilleure actrice pour Marius et Jeannette en 1998 et le prix d’interprétation à la Mostra de Venise pour Gloria Mundi, en 2019. Elle monte régulièrement sur scène, dernièrement dans Le Dernier Jour du jeûne de Simon Abkarian.
Un papa, une maman, une famille formidable (la mienne !)

BD de Florence Cestac
« Si je me suis marié, c'est pour me faire servir ! » Ainsi commence avec fracas cette nouvelle bande dessinée de Florence Cestac. Avec sa faconde habituelle, elle y raconte son père, homme d'une époque (avant 68...), d'un milieu (la petite bourgeoisie de province), et leurs relations tumultueuses. Entre une fille déjà artiste et rebelle à toute forme d'autorité, et un père colérique, pour qui dire « je t'aime » est un signe de faiblesse, la vie n'a pas été un long fleuve tranquille.
Extrait d'une interview accordée à TELERAMA (14/02/2021)
« J’ai fait cet album par réaction aux manifestations contre le mariage pour tous. Voir tous ces gens, la gueule enfarinée, soutenir un modèle loin d’être performant m’a légèrement agacée. J’ai attendu que ma mère ne soit plus de ce monde pour m’y mettre, cet album ne l’aurait sûrement pas fait rire. Malgré tout ce que son époux lui a fait subir, elle lui est toujours restée attachée. Elle lui trouvait des excuses, disait qu’il avait un caractère spécial, mais qu’il avait bon fond. Après tout, il ne nous avait jamais battus, et nous n’avons jamais manqué de rien, du moins sur un plan matériel. Mon père était un phallocrate XXL. Épouse, famille, enfants : tout devait être ordonné et réglé selon son bon plaisir.. »
Un entretien sur France Inter, le 10/02/2021 (ICI)
Pourquoi lire - 13 bonnes raisons (au moins)

Livre collectif
Pour célébrer ses 70 ans, la maison d'édition allemande Suhrkamp a demandé à ses auteurs ce qui les pousse à lire.
Textes signés Annie Ernaux, Philippe Garnier, Jürgen Habermas, Eva Illouz, Frédéric Joly, Esther Kinsky, Sibylle Lewitscharoff, Nicolas Mahler, Oliver Nachtwey, Katja Petrowskaya, Hartmut Rosa, Clemens J. Setz et Joëlle Zask.
" Joyeuse chasse aux livres ! " Ainsi l'écrivaine Sibylle Lewitscharoff souhaite-t-elle la bienvenue au lecteur de ce volume. Une chasse aux livres, comme un jeu enfantin dont émanerait une joie mêlée d'ivresse. Par un mystérieux sortilège, il suffirait qu'on en trouve un pour que trois autres apparaissent à sa place. On en aurait pour toute une vie.
Ici, la partie de chasse se joue à treize. Treize écrivains – romanciers, philosophes, sociologues, essayistes, mais aussi un auteur de bande dessinée – se lancent à la poursuite des livres pour dire le miracle de la lecture et expliciter le sens qu'elle revêt dans nos sociétés.
À les lire, le geste d'ouvrir un livre semble relever d'une aventure inépuisable, profondément singulière. Car lire, ce n'est pas – du moins pas seulement – cette activité tellement encouragée qu'elle en deviendrait presque suspecte. Elle peut bel et bien engager " la totalité de l'être ", comme l'écrit Annie Ernaux.
C'est cet engagement que décrivent, de manière tour à tour intime et théorique, les contributeurs de ce volume.
Vous tenez ainsi entre vos mains une bibliothèque aux portes dérobées. Chacune mène vers d'autres bibliothèques et d'autres portes dérobées.
Les raisons de lire sont innombrables.
En voici déjà treize.
les siestes du grand-père

Livre de Monia Ben Jémia
« La maison des grands-parents résonnait des musiques des fêtes et du silence de l’inceste. Lumineuse, joyeuse, emplie de musique et des cris de joie des enfants et des you you. Et sombre, effrayante, enfouie dans un épais silence ; on y entrait par une grande porte vitrée, protégée de fer forgé noir, les barreaux de sa prison.»
Dans ce récit, d'une implacable justesse, la victime relate une enfance qui a toutes les apparences d’un temps paisible, joyeux, sans souci. Pourtant, malmenée par les caprices et l'autorité perverse d'un parent faussement aimant, cette enfance a été volée, violée dans le plus grand secret. À l'étage, à mi-ombre, à l'heure de la sieste la pieuvre venait déployer ses tentacules et s'emparer de la victime. Une image d'effroi qui la poursuivra à jamais.
Ce livre, entre réalité et fiction, vient témoigner contre l'oubli et le silence, parce qu'il faut que le crime soit nommé, parce qu'il est illégitime de confisquer la mémoire de l'autre, parce que les grandes blessures tues se referment mal et exigent d'être reconnues et soulagées.
Dictionnaire abrégé du surréalisme

Livre d'André Breton et Paul Éluard (réédition)
Ce document de 80 pages abondamment illustrées (couverture d’Yves Tanguy) offre au lecteur, en même temps qu’un panorama de l’expérience picturale surréaliste à travers le monde, des informations précieuses sur les poètes et plasticiens du mouvement. Mais son apport le plus fascinant consiste dans la moisson de ‘définitions’ pourtant aussi bien sur des concepts que sur des objets ou personnages choisis, définitions empruntées aussi bien aux grands anciens (Swift, Lichtenberg, Duchamp, Vaché) qu’aux surréalistes mêmes, d’Aragon à Scutenaire et Tzara-- ou résultant de l’‘invention collective’ telle qu’elle se révèle par les divers ‘jeux’.[Ce] document demeurent, quarante ans après sa parution, un miroir exemplaire de l’illumination surréaliste à la fin des années trente. A nôtre époque de slogans et d’explications simplistes, son pouvoir éclairant, par contraste, n’a fait que grandir. Il est également significatif que le premier ‘dictionnaire du Surréalisme’ ait été écrit par les surréalistes eux-mêmes.
Avec des textes de Louis Aragon, Jean ou Hans Arp, Antonin Artaud, Hans Bellmer, André Breton, René Crevel, Salvador Dalí, Robert Desnos, Marcel Duchamp, Paul Éluard, Max Ernst, Maurice Heine, Georges Hugnet, Michel Leiris, Gilbert Lély, Jean Lély, Pierre Mabille, Man Ray, Édouard-Léon-Théodore Mesens, Pierre Naville, Vitezslav Nezval, Paul Nougé, Wolfgang Paalen, Henri Pastoureau, Pablo Picasso, Benjamin Péret, Jacques Prévert, Louis Scutenaire, Gui Rosey, Philippe Soupault, Tristan Tzara.
Mémoires d’un aventurier juif - Du Shtetl de Lituanie au Soudan du Mahdi

Livre de Getzel Sélikovitch
Enfant prodige né à Riteve en Lituanie en 1855, Getzel Sélikovitch est envoyé à Paris où il étudie les langues sémitiques et l’égyptologie, et entame un parcours hors du commun qui le conduira en Afrique, en Italie, en Grèce et en Turquie, occasionnant à chaque fois de multiples rencontres. ‘Grand reporter’ avant la lettre, élève d’Ernest Renan et de Gaston Maspero au Collège de France, il part au Caire avec une bourse, participe à une mission militaire au Soudan pour sauver le général anglais ‘Gordon Pacha’, combat les troupes du pseudo-messie musulman Muhammad Abdallah à Khartoum, fait évader une jeune fille du Harem du Sultan à Istanbul et est mêlé à un assassinat politique dont il rend compte dans différents journaux en hébreu et en français au point qu’un de ses articles dans L’intransigeant manque de provoquer une guerre entre la France et la Grande Bretagne. Devenu persona non grata sur le sol français, il émigre finalement aux USA où il meurt en 1926. Ses Mémoires, qui parurent en feuilleton dans la presse yiddish new-yorkaise entre 1919 et 1920, nous font découvrir une personnalité riche en couleurs comme l’intelligentsia du premier XXe siècle pouvait encore en compter, mêlant un goût immodéré de l’aventure à des talents certains de journaliste-voyageur relevés par une belle érudition polyglotte.
L'homme qui tremble

Livre de Lionel Duroy
Je tourne la page, et ça y est, la chose est enfin dite : " Dans un entretien, observe Nathalie Léger, Marguerite Duras s'énerve un peu : "L'autoportrait, je ne comprends pas ce que ça veut dire. Non, je ne comprends pas. Comment voulez-vous que je me décrive ? Qui êtes vous, allez-y, répondez-moi, hein ? " " Qui je suis, moi ? C'est la question à laquelle je dois maintenant répondre. Lionel Duroy aura passé l'essentiel de son temps à écrire. A travers ses nombreux romans, il a tenté de démêler les fils d'une vie, éclairant au passage celles et ceux qui nous aident à grandir ou s'emploient à nous détruire, parfois sans le vouloir : nos parents, nos frères et soeurs, ceux que nous aimons, puis désaimons. Aujourd'hui, avec L'homme qui tremble, il inverse les perspectives et, dans un autoportrait cruel et lumineux, s'interroge sur son propre rôle dans ce destin singulier.
À travers la mort - Mémoires inédits, 1886-1890

Livre de Louise MICHEL
L’histoire de la publication des Mémoires de Louise Michel est étonnante : elle débute en 1886, chez l’éditeur Roy, sous le titre – maintes fois réédité – de Mémoires de Louise Michel écrits par elle-même. Tome I. Aucun autre tome n’a suivi. Et si, par la suite, sont venus s’accoler d’autres écrits de la célèbre anarchiste, les soixante-dix feuilletons qui constituent le véritable second tome, parus dans la presse de 1890, avaient « disparu », peut-être victimes collatérales d’une entreprise de récupération de l’autobiographie de Louise Michel juste après sa mort. Aussi l’édition de ce second tome, inédit en librairie, constitue-t-elle un événement.
Couvrant les années 1886-1890 (période qui s’ouvre après la mort de Marianne Michel, la mère, et de Victor Hugo, l’idole, pour se refermer en août 1890, à son départ pour Londres), ce gisement incroyablement riche révèle une écrivaine viscéralement engagée dans l’écriture, vivant ensemble le rapport à l’histoire, à la mémoire, au présent de sa lutte et à l’écriture.
L’édition critique de ces Mémoires, accompagnée d’un dossier documentaire, est établie par Claude Rétat, directrice de recherche au CNRS.
Se ressaisir - Enquête autobiographique d’une transfuge de classe féministe

Livre de Rose-Marie LAGRAVE
Du genre autobiographique, on connaissait les récits sans enquête et les ego-histoires de « grands hommes » ; dans les sciences sociales, les enquêtes sur des proches tenus à distance par l’effacement de soi. Renouant avec l’ambition d’une sociologie sensible et réflexive, Rose-Marie Lagrave propose un nouveau type de socioanalyse : l’enquête autobiographique.
Ressaisissant son parcours en sociologue et en féministe, elle remet en cause les récits dominants sur la méritocratie, les stéréotypes associés aux transfuges de classe, le mythe d’un « ascenseur social » décollant par la grâce de talents ou de dons exceptionnels. Cet ouvrage retrace une migration sociale faite de multiples aléas et bifurcations, où domination de classe et domination de genre s’entremêlent : le parcours d’une fille de famille nombreuse, enracinée en milieu rural, que rien ne prédestinait à s’asseoir sur les bancs de la Sorbonne puis à devenir directrice d’études à l’EHESS, où elle croise notamment les chemins de Michelle Perrot, Françoise Héritier, Pierre Bourdieu et Jean-Claude Passeron.
Mobilisant un vaste corpus théorique et littéraire, Rose-Marie Lagrave ouvre sa malle à archives et la boîte à souvenirs. De ses expériences de boursière à ses engagements au MLF et sa pratique du métier de sociologue, elle exhume et interroge les traces des rencontres qui l’ont construite. Parvenue à l’heure des bilans, cette passeuse de frontières et de savoirs questionne avec la même ténacité la vieillesse et la mort.
Contre les injonctions de « réussir » et de « rester soi », ce livre invite à imaginer de nouvelles formes d’émancipation par la socioanalyse : se ressaisir, c’est acquérir un pouvoir d’agir, commun aux transfuges de classe et aux féministes, permettant de critiquer les hiérarchies sociales et de les transgresser.
L'inconnu de la poste

Livre de Florence Aubenas
Le village, c'est Montréal-la-Cluse. La victime, c'est Catherine Burgod, tuée de vingt-huit coups de couteau dans le bureau de poste où elle travaillait. Ce livre est donc l'histoire d'un crime. Il a fallu sept ans à Florence Aubenas pour en reconstituer tous les épisodes – tous, sauf un. Le résultat est saisissant. Au-delà du fait divers et de l'enquête policière, L'Inconnu de la poste est le portrait d'une France que l'on aurait tort de dire ordinaire. Car si le hasard semble gouverner la vie des protagonistes de ce récit, Florence Aubenas offre à chacun d'entre eux la dignité d'un destin.
J'ai rêvé l'algérie

Témoignages, fictions et récits
Ouvrage collectif, projet initié et financé par la Fondation Friedrich Ebert Algérie. Disponible gratuitement et en intégralité sur internet.
Extrait de la présenation :
"...Des voix singulières nous entraînent dans des combinaisons infinies : fictions, autofictions, récits d’anticipation, témoignages, réflexions. Une seule ambition, un seul mot d’ordre : proposer une projection intime, réaliste ou non, d’une algérie meilleure. Quatorze textes, quatorze subjectivités, à travers lesquels miroite la possibilité de construire une société de libertés, de progrès et de vivre-ensemble.
Cet ouvrage, plein d’espoirs, mais aussi de mises au point franches et sans concession, de vérités crues et courageuses – dites avec humour
souvent –, nous raconte qu’une autre algérie est possible."
Ce genre de petites choses

Livre de Claire Keegan
En cette fin d’année 1985 à New Ross, Bill Furlong, le marchand de bois et charbon, a fort à faire. Aujourd’hui à la tête de sa petite entreprise et père de famille, il a tracé seul sa route : élevé dans la maison où sa mère, enceinte à quinze ans, était domestique, il a eu plus de chance que d’autres enfants nés sans père.
Trois jours avant Noël, il va livrer le couvent voisin. Le bruit court que les sœurs du Bon Pasteur y exploitent à des travaux de blanchisserie des filles non mariées et qu’elles gagnent beaucoup d’argent en plaçant à l’étranger leurs enfants illégitimes. Même s’il n’est pas homme à accorder de l’importance à la rumeur, Furlong se souvient d’une rencontre fortuite lors d’un précédent passage : en poussant une porte, il avait découvert des pensionnaires vêtues d’horribles uniformes, qui ciraient pieds nus le plancher. Troublé, il avait raconté la scène à son épouse, Eileen, qui sèchement lui avait répondu que de telles choses ne les concernaient pas.
Un avis qu’il a bien du mal à suivre par ce froid matin de décembre, lorsqu’il reconnaît, dans la forme recroquevillée et grelottante au fond de la réserve à charbon, une très jeune femme qui y a probablement passé la nuit. Tandis que, dans son foyer et partout en ville, on s’active autour de la crèche et de la chorale, cet homme tranquille et généreux n’écoute que son cœur.
Claire Keegan, avec une intensité et une finesse qui donnent tout son prix à la limpide beauté de ce récit, dessine le portrait d’un héros ordinaire, un de ces êtres par nature conduits à prodiguer les bienfaits qu’ils ont reçus.
["Bonnes sœurs et mauvaises filles" - note dans la CANARD ENCHAINE du 30 décembre 2020]
Jamais rien ne meurt - Vietnam, mémoire de la guerre

Livre de Viet Thanh Nguyen
Après le retentissement international du Sympathisant, Viet Thanh Nguyen revient avec un essai remarquable et érudit sur la guerre, la mémoire et l'identité. Puisant dans sa propre histoire, celle d'un intellectuel vietnamien ayant vécu l'exil et grandi aux États-Unis, l'auteur s'interroge sur cette guerre que les Vietnamiens nomment " américaine " et que les Américains nomment " du Vietnam ". De quelle manière est-elle remémorée, commémorée, industrialisée ? Quels sont les enjeux de la bataille du souvenir ?
Analysant de nombreuses formes de témoignage, dont essais, romans, photographies, films, monuments commémoratifs, Viet Thanh Nguyen dépasse l'interprétation binaire du conflit pour tenter de restituer une mémoire juste, globale, qui prendrait aussi en considération d'autres points de vue, notamment ceux des civils, des ennemis, des vaincus et des populations alentour.
Chercher à restituer la vérité pour que jamais rien ne meure. Reconnaître la part d'humanité et d'inhumanité de chacun. Permettre la réconciliation et, ainsi, éviter que l'Histoire ne se répète.
Un père étranger

Livre d'Eduardo Berti
De Buenos Aires à Madrid, en passant par Paris et le Kent, ce roman nous entraîne au cœur des questionnements sur l’identité, la transmission, l’exil et l’écriture.
Fils d’un immigré roumain installé à Buenos Aires, le narrateur, écrivain, décide de partir vivre à Paris. Dans un café, il prend l’habitude de lire les lettres que son père lui envoie et se remémore alors l’histoire de sa famille. Quand il apprend que son père est lui aussi en train d’écrire un livre, il se sent dérouté. Et voilà que vient s’intercaler une autre histoire, celle de Józef et de son épouse, Jessie, tous deux installés en Angleterre. Józef est écrivain lui aussi, d’origine polonaise, exilé en Angleterre : l’immense écrivain Joseph Conrad pourrait bien devenir le personnage du prochain roman de notre narrateur argentin.
Avec ces histoires qui s’imbriquent, Eduardo Berti tisse une toile particulièrement fine et prenante. Son sens de la formule et son humour créent une narration dynamique qui emporte le lecteur.
Présentation par l'auteur
Kukum

Livre de Michel Jean
Au soir de sa vie, grand-mère (kukum, en langue innue) depuis longtemps déjà, Almanda Siméon se retourne sur son passé et nous livre son histoire, celle d'une orpheline québécoise qui tombe amoureuse d'un jeune Amérindien puis partage la vie des Innus de Pekuakami (l'immense lac Saint-Jean), apprenant l'existence nomade et brisant les barrières imposées aux femmes autochtones. Centré sur le destin singulier d'une femme éprise de liberté, ce roman relate, sur un ton intimiste, la fin du mode de vie traditionnel des peuples nomades du nord-est de l'Amérique et les conséquences, encore actuelles, de la sédentarisation forcée. Son auteur Michel Jean, descendant direct d'Almanda Siméon, est un journaliste reconnu au Québec.
Aucune terre n'est promise

Livre de Lavie Tidhar
Berlin. Lior Tirosh, écrivain de seconde zone, embarque pour la Palestina, fuyant une existence minée d'échecs. Il espère retrouver à Ararat City la chaleur du foyer, mais rien ne se passe comme prévu : la ville est ceinturée par un mur immense, et sa nièce, Déborah, a disparu dans les camps de réfugiés africains. Traqué, soupçonné de meurtre, offert en pâture à un promoteur véreux, Lior est entraîné malgré lui dans les dédales d'une histoire qu'il contribue pourtant à écrire. Lavie Tidhar questionne nos identités, et le prix qui leur est attaché. Aucune terre n'est promise est un roman d'une incroyable lucidité sur les enjeux d'Israël, microcosme du monde. Il n'en cède pourtant rien à la poésie, seule utopie capable encore d'incarner la paix.
À s’en bruler les ailes : Récits de souffrance au travail

Livre collectif
Sept récits dans ce livre : autant de parcours singuliers, avec en commun une implication passionnée dans le travail, jusqu’à trop s’approcher du soleil.
Sept contextes professionnels, car la souffrance au travail, jusqu’à l’épuisement, peut survenir quel que soit le métier, le type d’organisation, peut briser une débutante enthousiaste comme une professionnelle expérimentée.
Sept femmes, qui se sont rencontrées au hasard d’un atelier animé par des assistantes sociales, qui ont pris la parole, puis la plume pour échanger leurs vécus, se soutenir, puis reprendre le chemin d’un travail collectif : écrire un livre.
Sept textes, parce qu’elles ont voulu témoigner, prévenir les autres, dire leur conviction : écouter son corps, prendre soin de soi.
entrées en classe - récits d'enseignants débutants

Livre collectif
« Quand je raconte mon travail, j’y vois plus clair ! »
Des professeurs stagiaires de collège ou de lycée se prêtent à l’exercice.
Dix récits de travail, composés à partir d’écrits réalisés dans le cadre de leur formation à l’Isfec-Afarec d’Ile-de-France.
Dix récits à la première personne, où chacun expose ses confrontations à un problème posé par l’entrée dans le métier. Au plus près de la réalité des classes.
Elles et ils sont jeunes et moins jeunes.
Elles et ils enseignent les maths, la philo, l’anglais, les sciences médico-sociales, l’histoire-géo, le français.
Elles et ils ont été affecté·es en collège, en lycée général, en lycée professionnel, en banlieue francilienne ou dans un établissement chic de Paris.
Elles et ils racontent leurs tâtonnements, leurs progrès, leurs prises de conscience. Et chemin faisant, se professionnalisent.
Un bref instant de splendeur

Livre de Ocean Vuong
Un bref instant de splendeur se présente sous la forme d’une lettre qu’un fils adresse à sa mère qui ne la lira jamais. Fille d’un soldat américain et d’une paysanne vietnamienne, elle est analphabète, parle à peine anglais et travaille dans un salon de manucure aux États-Unis. Elle est le pur produit d’une guerre oubliée. Son fils, dont la peau est trop claire pour un Vietnamien mais pas assez pour un Américain, entreprend de retracer leur histoire familiale : la schizophrénie de sa grand-mère traumatisée par les bombes ennemies au Vietnam, les poings durs de sa mère contre son corps d’enfant, son premier amour marqué d’un sceau funeste, sa découverte du désir, de son homosexualité et du pouvoir rédempteur de l’écriture.
Ce premier roman, écrit dans une langue d’une beauté grandiose, explore avec une urgence et une grâce stupéfiantes les questions de race, de classe et de masculinité. Ocean Vuong signe une plongée dans les eaux troubles de la violence, du déracinement et de l’addiction, que la tendresse et la compassion viennent toujours adroitement contrebalancer. Un livre d’une justesse bouleversante sur la capacité des mots à panser les plaies ouvertes depuis des générations.
Janvier 15 - le procès

BD de Yannick Haenel & François Boucq
Pour rendre compte de ce procès unique, l'écrivain Yannick Haenel et le dessinateur François Boucq ont été les oreilles et les yeux de Charlie Hebdo
Le procès des attentats de janvier 2015 contre Charlie Hebdo, une policière municipale de Montrouge et le magasin Hyper Cacher de la porte de Vincennes, à Paris, s'est ouvert le 2 septembre 2020 et aura duré près de deux mois et demi.
Historique par son ampleur, ce procès, qui juge des présumés complices d'attentats islamistes, aura rouvert la question de l'islamisme et de son imprégnation dans la société française.
[Un entretien avec Yannick Haenel dans DIACITIK, le 01/02/2021]
Le consentement

Livre de Vanessa Springora [parution en Livre de poche]
« Depuis tant d'années, je tourne en rond dans ma cage, mes rêves sont peuplés de meurtre et de vengeance. Jusqu'au jour où la solution se présente enfin, là, sous mes yeux, comme une évidence : prendre le chasseur à son propre piège, l'enfermer dans un livre. ».
Séduite à l'âge de quatorze ans par un célèbre écrivain quinquagénaire, Vanessa Springora dépeint, trois décennies plus tard, l'emprise qui fut exercée sur elle et la trace durable de cette relation tout au long de sa vie de femme. Au-delà de son histoire intime, elle questionne dans ce récit les dérives d'une époque et d'un microcosme littéraire aveuglé par le talent et la notoriété.
Entretien dans La Grande Librairie de François Busnel.
Un détail mineur

Livre d'Adania SHIBLI
En 2003, un quotidien israélien, Haaretz, révèle qu’en août 1949 des soldats ont kidnappé, violé collectivement, puis tué et enterré une jeune bédouine du Néguev. Un crime qui s’inscrit dans la lignée des massacres commis à cette époque charnière pour terrifier ce qui restait des habitants de cette zone désertique.
Soixante-dix ans plus tard, Adania Shibli s’empare de cet “incident” dans un récit qui s’articule en deux temps nettement marqués. La première moitié relate le déroulement du crime avec une objectivité quasi chirurgicale. Elle met en scène deux personnages principaux : un officier israélien anonyme, maniaque de l’ordre et de l’hygiène, qui envahit les pages de sa présence hypnotique, et sa victime, comme lui jamais nommée. La seconde partie est narrée à la première personne, sur un ton très subjectif et ironique, par une Palestinienne d’aujourd’hui, obsédée par un “détail mineur” de l’incident : le fait qu’il se soit produit vingt-cinq ans jour pour jour avant sa naissance. Bravant les obstacles imposés par l’occupant, elle parvient à se rendre dans le Néguev dans l’espoir d’exhumer le récit occulté de la victime. Mais la détective en herbe ne tardera pas à tourner en rond…
Longuement mûri, ce roman décapant dénonce en peu de pages, au-delà du contexte israélo-palestinien, le viol comme banale arme de guerre, et aborde subtilement le jeu de la mémoire et de l’oubli.
La Fabuleuse Histoire de l'invention de l'écriture

Livre de Silvia Ferrara
« Ce livre n’est pas un livre sur le grec ancien, ni sur l’alphabet. C’est un récit, qui parle d’une invention, la plus grande du monde » Silvia Ferrara
Pourquoi l’homme s’est-il mis à écrire ? Comment et où cette révolution a-t-elle eu lieu ? Voilà les mystères sur lesquels Silvia Ferrara lève le voile. Pour cela, elle nous fait voyager dans le temps et l’espace comme dans les méandres de l’esprit humain. Ici, elle dresse
le fascinant inventaire des graphies non encore élucidées ; là, elle retrace les multiples apparitions de l’écriture dans l’histoire. Car tout laisse penser qu’elle a été découverte et s’est effacée, sans laisser de traces, à plusieurs reprises. Sa naissance en Mésopotamie au quatrième millénaire avant notre ère n’aurait été qu’une occurrence parmi tant d’autres.
Pris par un récit vertigineux, qui nous transporte du Mexique aux pourtours de la mer Égée, de la Chine aux Îles de Pâques, nous suivons pas à pas les progrès d’une recherche qui a considérablement progressé dans les dernières décennies. Enrichie d’illustrations, cette Fabuleuse Histoire… nous instruit autant qu’elle nous fait rêver.
Sur France Culture, le 7/01/2021
La vengeance m’appartient

Livre de Marie Ndiaye
Me Susane, quarante-deux ans, avocate récemment installée à Bordeaux, reçoit la visite de Gilles Principaux. Elle croit reconnaître en cet homme celui qu’elle a rencontré quand elle avait dix ans, et lui quatorze — mais elle a tout oublié de ce qui s’est réellement passé ce jour-là dans la chambre du jeune garçon. Seule demeure l’évidence éblouissante d’une passion.
Or Gilles Principaux vient voir Me Susane pour qu’elle prenne la défense de sa femme Marlyne, qui a commis un crime atroce… Qui est, en vérité, Gilles Principaux ?
L'enfant des camps

Livre de Francine Christophe
Arrêtée en Juillet 1942 avec sa mère sur la ligne de démarcation, Francine Christophe est encore une enfant. Elle a presque neuf ans, l’âge des jours heureux quand elle est rattrapée par la folie nazie. Interrogée par la Gestapo, enfermée de prison en prison, ballotée de camp en camp, en France d’abord, elle est déportée en mai 1944 au camp de concentration de Bergen-Belsen. A son retour, quand elle essaye d’expliquer à ses camarades de classe ce que la guerre lui a fait, celles-ci la regardent, gentiment, mais tournent l’index sur la tempe, l’air de dire : elle est folle. La jeune Francine ne parle plus du cauchemar qui a duré trois ans.
Aujourd’hui, les mots refont surface. Francine Christophe raconte ce qu’elle vu et connu. Les coups, le froid, la faim. Les familles qu’on sépare. Les enfants qu’on entasse dans des wagons à bestiaux. La maladie et la mort. Les travées boueuses où les cadavres pourrissent. La cruauté. Mais aussi l’amour, celui d’une mère et de sa fille, indéfectible, qui résiste à la guerre. Et des miracles, comme ce bébé qui voit le jour dans l’enfer de Bergen-Belsen et survit grâce à l’entraide et la fraternité des femmes.
Pour que tous nous sachions et n’oublions pas ce que fut la Shoah.
Sans ciel ni terre - Paroles orphelines du génocide des Tutsi (1994-2006)

Livre d'Hélène DUMAS
Dans l’amas des archives de la principale institution chargée de l’histoire et de la mémoire du génocide au Rwanda, plusieurs liasses de fragiles petits cahiers d’écoliers renfermaient dans le silence de la poussière accumulée les récits d’une centaine d’enfants survivants.
Rédigés en 2006 à l’initiative d’une association rwandaise de rescapés, dans une perspective testimoniale et de catharsis psychologique, ces témoignages d’enfants devenus entre-temps des jeunes hommes et des jeunes femmes, racontent en trois scansions chronologiques souvent subverties ce que fut leur expérience du génocide, de la « vie d’avant » puis de la « vie d’après ». Leurs mots, le cruel réalisme des scènes décrites, la puissance des affects exprimés, livrent à l’historien une entrée incomparable dans les subjectivités survivantes et permettent, aussi, d’investir le discours et la gestuelle meurtrière de ceux qui éradiquèrent à jamais leur monde de l’enfance.
Le livre tente une écriture de l’histoire du génocide des Tutsi à hauteur d’enfant. Il donne à voir et à entendre l’expression singulière d’une expérience collective, au plus près des mots des enfants, au plus près du grain de la source. Tentative historiographique qui est aussi une mise à l’épreuve affective et morale pour l’historienne face à une source saturée de violence et de douleur. Loin des postulats abstraits sur l’« indicible », le livre propose une réflexion sur les conditions rendant audibles les récits terribles d’une telle expérience de déréliction au crépuscule de notre tragique XXe siècle.
Rwanda, le génocide à hauteur d’enfants
Marguerite Duras

Livre de Simona Crippa
Démesure, scandale, incantations… C’est la force du mythe qui revit et se renouvelle dans la voix de Marguerite Duras qui, comme le mythologue de la cité, façonne notre mémoire, parle à notre imaginaire, crée et raconte le monde.
L’intérêt de cette étude est de parcourir l’œuvre de Marguerite Duras – littérature, cinéma, théâtre, écrits pour les journaux – afin de montrer que l’écrivaine procède sans cesse à la création d’espaces mythiques en renouvelant et modernisant l’univers mythologique.
L’effet incantatoire et scandaleux de sa parole, la pratique et les procédés de son écriture, les thèmes et les motifs récurrents de l’œuvre, sont analysés pour la première fois comme autant de manifestations d’un geste qui, par les réseaux profonds de toutes ces relations, a trait à la mythopoétique, c’est-à-dire à la fabrication du mythe.
C’est pourquoi la voix de Duras séduit encore lecteurs, chercheurs, écrivains contemporains : la parole du mythe est une force vive qui ne se tarit jamais.
[Un entretien avec l'auteure Simona Crippa - Diacritik 20/01/2021]
Fragments de mémoire d'un enfant ordinaire (1935-1947)

Livre de Rémy Landy
"Les grandes personnes ont d'abord été des enfants mais peu d'entre elles s'en souviennent", écrivait un célèbre aviateur poète. Pourtant certaines d'entre elles tentent de s'en souvenir — dont l'auteur de cette brève autobiographie. Le récit commence en Corrèze, région d'abord épargnée par la guerre, puis sévèrement touchée par une répression allemande et pétainiste qui cherche à broyer la Résistance.
Il s'achève en Allemagne, au lendemain de la guerre, dans la zone d'occupation française (Baden-Baden, Constance). Des anecdotes inédites parsèment ce récit. Ici, la vie familiale permet de toucher du doigt l'atmosphère de cette époque troublée. Et c'est le paradoxe d'une vie somme toute presque heureuse d'un enfant ordinaire au milieu de circonstances qui ne l'étaient pas.
STADE NATIONAL 1973 - Le Chili les yeux bandés - Essai autobiographique

Livre de Jorge Montealegre Iturra
À la suite du coup d'État militaire de 1973 au Chili, Jorge Montealegre est emprisonné comme tant d'autres au Stade national de Santiago, puis au camp de concentration de Chacabuco, dans le désert d'Atacama. Il a 19 ans. C'est en prison qu'il découvre sa vocation littéraire. Il ne cessera plus d'écrire. Exilé, il publie son témoignage de détenu au camp de Chacabuco en 1974. Il rentre au Chili définitivement en 1979.
Professeur, essayiste, poète, journaliste, scénariste, ses domaines d’investigation sont la mémoire, la résilience, l’imaginaire et l’humour graphique. Il a publié de nombreux ouvrages, parmi lesquels Frazadas del Estadio Nacional (2003), Derecho a fuga, una extraña felicidad compartida (2018) et reçu de nombreuses distinctions pour ses travaux.
Cheville ouvrière : essai de journalisme critique en quartiers populaires

Livre d'Antoine Tricot
Qu’est-ce qu’un quartier populaire en dehors du journal télévisé de 20 h ? Sans sensationnalisme, ni misérabilisme ? Poser cette question, c’est d’abord faire face à toute une série de clichés, de tics et de raccourcis liés à la fabrique médiatique de l’image des banlieues. Peut-on changer ce prisme qui nous fait voir ces espaces hétéroclites au travers uniquement du fait divers, de la violence, de la drogue et de tous les maux (et les mots) auxquels on les associe ?
Antoine Tricot, en tant que journaliste, a expérimenté une autre façon d’aborder les quartiers populaires. Loin de la région parisienne, il a conduit pour cela une résidence d’écriture de deux ans dans le Nord. À Saint-Pol-sur-Mer, 23 000 habitants, dans la communauté urbaine de Dunkerque. Une ville ouvrière et « ouvriée » – taraudée, entre industrie et urbanisation. Il s’est immergé sur place avant la mise en chantier d’un grand projet de rénovation urbaine. Son terrain : d’un côté les cités Guynemer et Jean-Bart, soit deux barres HLM de 900 logements (construites en 1973) et de l’autre une cité-jardin cheminote (datant de 1920). Deux quartiers limitrophes, tout à fait différents, pourtant classés en quartiers prioritaires de la politique de la ville et portant ensemble la même mémoire ouvrière.
Ouvriers, cheminots à la retraite, jeunes au chômage, étudiants, fonctionnaires, allocataires du RSA, éducateurs de rue, ados, jeunes footballeuses, vieux mécanicien, employés des bailleurs sociaux, jeune cadre du FN local, médecin, député-maire… Autant de personnages pour un itinéraire jalonné de récits recueillis, montés comme des pièces radiophoniques, et mis en regard avec des archives et des articles des quotidiens locaux. Au cours de cette enquête mêlant journalisme, sociologie et histoire, une image se tisse, celle d’un territoire avec ses tensions raconté par ses habitants. La fierté ouvrière qui s’effrite à mesure que le chômage monte – mais qui reste chevillée au corps –, les paradoxes de la politique de la ville, la toute-puissance des bailleurs HLM, les traumatismes du trafic de drogue, la progression de l’extrême droite sur les friches du communisme, le découragement et la fatalité. Mais aussi les réussites et l’entraide, la valeur du travail des éducateurs, les engagements associatifs et politiques, la transmission, la richesse des identités diverses et la foi dans l’avenir. Un récit écrit à la première personne, avec subjectivité et tonicité.
Un lieu comme il y en a tant d’autres en France, chez les « invisibles » et les oubliés, « délaissés », caricaturés mais dont l’expérience est pourtant d’une utilité publique et universelle. Ce type d’étude met en lumière une autre façon de voir, d’écouter et de transmettre l’actualité d’un espace très observé mais trop peu compris.
[Entretien sur le site TOUTE LA CULTURE, le 14/11/2020]
[Une tribune d'Antoine Tricot, dans LIBERATION , le 13/10/2020]
Un garçon comme vous et moi

Livre de Ivan Jablonka
De livre en livre, Ivan Jablonka ouvre des voies nouvelles. Avec une audace et une créativité peu communes, il invente ses sujets et ses formes. Après Laëtitia, après En camping-car, il explore sa « garçonnité » dans les années 1970-1980, s’interrogeant sur le « nous-garçons » et les frontières incertaines entre masculin et féminin.
De sa famille au service militaire en passant par l’école, il raconte sa formation au fil d’une enquête souvent poignante, parfois drôle – toujours passionnante – où beaucoup pourront se reconnaître. Car cette « autobiographie de genre » dévoile une intimité à la fois individuelle, sociale et politique : l’histoire d’une génération. Avec une honnêteté troublante, Ivan Jablonka analyse le « malaise dans le masculin » qui fut le sien, restituant le vif et l’éclat de l’enfance dans ses enthousiasmes, ses émois et ses peines.
Par instants, la vie n’est pas sûre

Livre de Robert Bober
« Si j’ai choisi de t’écrire Pierre, c’est que j’ai préféré m’adresser à toi plutôt que de parler de toi. Il m’a semblé ainsi réduire, effacer même par instants, la distance qui sépare la vie de la mort. »
Il y eut une rencontre décisive dans la vie de Robert Bober, celle avec Pierre Dumayet (1923 – 2011), journaliste, écrivain, qui a introduit les livres et la littérature à la télévision avec Lecture pour tous, puis Lire c’est vivre, qu’il présentera pendant plus de quinze ans. Robert Bober devenu réalisateur à la télévision collabore étroitement avec Pierre Dumayet. Et c’est à lui, aujourd’hui, que Robert Bober s’adresse dans une longue lettre-récit, accompagnée de nombreuses images (photographies, films, illustrations). Il raconte leur amitié, leurs souvenirs communs sur les tournages des films, leurs lectures, leurs rencontres (le grand rabbin Safran, André Schwarz-Bart, Perec, Duras, le Cardinal Lustiger, Alechinsky, Hartung…). À la façon d’un puzzle jamais fini, Robert Bober revisite sa propre existence, les lieux, les histoires, les images et les textes qui l’ont marqué. Il nous fait partager ses admirations et ses indignations parfois. Le livre épouse les caprices de la mémoire familiale et historique, s’égare, s’interroge et fait des découvertes bouleversantes. C’est un jeu sur le souvenir, qui interprète et raconte les silences, les oublis, qui raccorde des histoires entre elles et avec la vie, s’interroge sur la langue, l’écriture, le yiddish bien sûr, l’art et les mots. Robert Bober, en adressant cette lettre-souvenir en hommage à son ami disparu, fait aussi le récit éclaté, émouvant, de son existence.
La Maison de Bretagne

Livre de Marie Sizun
Décidée à vendre la maison du Finistère, où depuis l’enfance, elle passait ses vacances en famille, parce que restée seule, elle n’en a plus l’usage, et surtout parce que les souvenirs qu’elle garde de ce temps sont loin d’être heureux, Claire prend un congé d’une semaine de son bureau parisien pour régler l’affaire. Elle se rend sur place en voiture un dimanche d’octobre. Arrivée chez elle, une bien mauvaise surprise l’attend. Son projet va en être bouleversé. Cela pourrait être le début d’un roman policier. Il n’en est rien ou presque. L’enquête à laquelle la narratrice se voit soumise n’est que prétexte à une remontée des souvenirs attachés à cette maison autrement dramatique pour elle.
Et si, à près de cinquante ans, elle faisait enfin le point sur elle-même et les siens ?
Dans La Maison de Bretagne, Marie Sizun reprend le fil de sa trajectoire littéraire et retrouve le thème dans lequel elle excelle : les histoires de famille. Il suffit d’une maison, lieu de souvenirs s’il en est, pour que le passé non réglé refasse surface. L’énigme d’une mère, l’absence d’un père, les rapports houleux avec une sœur, voici la manière vivante de ce livre. Mais comme son titre l’indique, c’est aussi une déclaration d’amour à la Bretagne, à ses ciels chahutés et sa lumière grandiose, à l’ambiance hors du temps de ce village du bout des terres, face à l’Océan, où le sentiment de familiarité se mêle à l’étrangeté due à une longue absence.
La putain du Califat

Livre de
Le manuel de l’esclavage, c’est un peu la Convention de Genève du djihadisme, écrite par une génération qui croit vivre dans l’Arabie du viie siècle tout en regardant Game of Thrones, où les scènes de bordels servent d’intermèdes aux décapitations… Esclave de douze maîtres, vendue et revendue de Qaraqosh en Irak à Raqqa en Syrie, l’histoire de Marie dessine la géographie de l’État islamique. Et sa théologie : tous les péchés des hommes se sont incarnés dans son corps de femme… »
Marie nous a confié son histoire : elle a exigé que tout soit raconté, que rien ne soit omis. Son récit bouleversant est celui d’une chrétienne capturée par les djihadistes, qui veut vivre, qui se bat, qui refuse de se laisser briser par la bestialité des hommes. Et celui de la victime, souillée, torturée, violentée, qui découvre finalement comment on est accueilli par les siens quand on revient de l’enfer.
Ce livre montre les exactions commises au nom de la charia. Il oblige à voir comment les fondamentalistes, qui n’ont d’yeux que pour les vierges du Paradis, transforment les femmes en putains.
La familia grande

Livre de Camille Kouchner
" Souviens-toi, maman : nous étions tes enfants. " C.K.
C'est l'histoire d'une grande famille qui aime débattre, rire et danser, qui aime le soleil et l'été.
C'est le récit incandescent d'une femme qui ose enfin raconter ce qui a longtemps fait taire la familia grande.
Camille Kouchner, 45 ans, est maître de conférences en droit. La Familia grande est son premier livre.Camille Kouchner, 45 ans, est maître de conférences en droit. La Familia grande est son premier livre.
[Une note de EAN du 9 janvier 2021]
[Entretien dans l'émission LA GRANDE LIBRAIRIE - 13/01/2021]
Noeuds de vie

Livre de Julien Gracq
"En 1980, au moment de la parution de En lisant en écrivant, Angelo Rinaldi, dans « L’express », souligna que Julien Gracq figurait parmi les contrebandiers habiles à faire passer les « frontières séparant les époques ». Plus de 40 ans après, ce constat reste d’actualité, comme si le temps avait eu peu de prise sur ses fragments, toujours devant nous.
Ce qui est frappant avec les textes inédits de Julien Gracq, rassemblés ici, par Bernhild Boie, son éditrice en Pléiade, c’est qu’il est aussi étonnant dans le grand angle (ses centres d’intérêt sont aussi bien historiques que géographiques) que dans le plan rapproché (tous ses textes sur des paysages ou des événements) ou le gros plan (certains textes sur des écrivains, des villes ou des phénomènes littéraires).
Gracq est un observateur pénétrant, sensible, perspicace. Aucune nostalgie ou lamentation dans cette vision du monde. Avec une liberté de ton et de regard inimitables, il nous invite à revoir à neuf nos propres jugements sur l’histoire, les écrivains, les paysages, l’accélération du temps, la détérioration de la nature, le passage des saisons, les jardins potagers, la vieillesse, le bonheur de flâner comme celui de lire...."